« On est comme des mineurs : on pioche et on gratte pour trouver la veine qui rendra le projet unique. » C’est ainsi que Gabriel Morales, à la tête de son nouveau studio, Sutil, comprend la créativité. Et c’est comme ça qu’il est arrivé au début de l’histoire de Novos. Car ces deux séduisantes étiquettes sont justement cela : le premier pas pour se plonger dans une belle histoire de vignes, de vignerons, de vins.
Labor de Sol, Tinto de Luna : ce sont deux très beaux noms. Quelle est leur histoire ?
Ils nous renvoient à l’histoire d’une famille de vignerons de Requena, des gens de la campagne qui n’ont pas épargné leur sueur dans les vignobles pendant plusieurs générations. La génération actuelle de Bodegas Novos a voulu rendre hommage à ses prédécesseurs, souligner leurs efforts et leurs sacrifices sous le soleil, mais elle a aussi voulu transmettre les moments de détente et de partage quand venait le soir. Le vin déploie toute sa puissance évocatrice au clair de lune, réussissant à connecter les gens et même à arrêter le temps.
Du nom à l’image : les étiquettes montrent des scènes sans équivoque et pourtant très évocatrices.
Oui, elles sont presque comme des contes. Je crois que nous avons réussi à mettre en lumière ce qui est évident, un héritage clair qu’il fallait communiquer, tout en y ajoutant une touche suggestive, qui va au-delà de la littéralité pour créer quelque chose de réaliste et de magique qui rend l’image particulière. C’est aussi formellement élégant. Tout cela séduit le consommateur.
La personnification est une sorte de cheminement créatif qui n’a pas de fin, quel que soit le style visuel adopté. Qu’est-ce qu’elle apporte ?
C’est comme se voir dans une glace. Montrer des gens, parler des gens nous fait nous sentir identifiés à la marque ou au produit. Se reconnaître facilite la communication. C’est une question de proximité, de crédibilité, de chaleur. Mais il y a aussi un poids culturel qui nous interpelle, car le portrait est le grand thème de la peinture depuis des siècles. Et nous portons cela au plus profond de nous.
Dans ce cas, il est clair que ce devait être le motif central.
Oui, évoquer la figure des grands-parents nous a paru tout naturel dès le départ. Le briefing avec le client a très bien préparé le terrain. Donc, dès que l’aspect créatif a été résolu, nous nous sommes concentrés sur comment représenter cela. Décider du registre, du ton et du style.
Qui a créé les illustrations ?
C’est Joan Miquel Bennassar, du studio Alademosca. Nous avons obtenu une représentation claire et précise, avec un contenu poétique qui fait la différence.
Quels aspects de l’impression souhaiteriez-vous mettre en avant ?
La principale exigence technique était de maintenir le registre entre les différentes couches et d’obtenir un emboutissage parfait. Dans tout processus de production graphique, il est indispensable de travailler au coude à coude avec l’imprimeur pour trouver la meilleure solution.
Ce travail est l’un des premiers de votre nouveau studio. Comment définiriez-vous Sutil ?
Nous sommes un studio créatif de design et de communication graphique spécialisé en identité et en packaging. Nous voyons le design comme un processus intégral – de la créativité jusqu’au contrôle de la production – qui nous permette d’apporter des solutions effectives au moyen de la réflexion et du langage visuel. Notre travail consiste pour beaucoup à identifier ce qui rend chaque client et chaque projet unique, de façon à lui conférer une identité propre qui lui apporte de la valeur, le relie émotionnellement à son public et le rende inoubliable.
Quel moment le monde du design de packaging du vin traverse-t-il ? Que recherchent les clients ? Quelles nouvelles voies s’ouvrent ?
Le but sera toujours de vendre, même si certains clients aspirent à un supplément d’âme. Il me semble percevoir plus d’honnêteté en ce moment, une volonté de découvrir ce qui rend un vin ou un projet unique. Pour créer quelque chose de plus authentique et de plus transparent. Il y a une certaine recherche d’équilibre après l’époque de « l’appel de la tête de gondole ». Auparavant les clients étaient moins conscients du besoin de mise en récit, le fameux storytelling, désormais de plus en plus en vogue. On demande beaucoup, maintenant, que l’étiquette s’aligne sur un récit : « J’ai besoin de raconter une histoire. » Ensuite, au niveau du langage visuel, on trouve un peu de tout : c’est la peau qui s’adapte à chaque projet.
En ce sens, comment doit être la construction du récit de marque de Novos ?
Le but est de conserver le même registre si la communication arrive à se dérouler. Il faut que ce soit comme un écheveau ou une pelote de laine, pour que le marché puisse tirer le fil. C’est ce que le projet exige pour qu’il y ait une vue d’ensemble, une cohérence. Je crois que tout cela arrivera, car il y a une volonté et il y a un discours.